mercredi 28 octobre 2009

Episode 107


Michelle

Lorsque Michelle se réveille (on ouvre l’épisode sur des yeux ouverts), on sent que ça va faire mal. Après avoir bien observé les choses, assise dans l’herbe avec le petit nœud de sa culotte qui dépasse, la voici qui déboule et qui flanque une rouste à Tony.
Excédée, humiliée, au bord de craquer, elle balance à la gueule de Tony toute sa frustration et balance à l’autre gueule de Tony, celle du bas, encore toute sa frustration.
Il fallait bien qu’un drame arrive, c’est par elle qu’il arrive.
Michelle est capricieuse, elle a toujours eu ce qu’elle a voulu, et lorsqu’elle ne l’a plus, elle pique une crise.

Mais en réalité, Michelle est dévastée : on n’assiste pas à un caprice d’enfant gâtée, mais bien à un malaise plus profond. Michelle a peu d’estime pour elle-même ; c’est pour cela qu’elle cherche constamment le regard des autres. Savoir que le regard de Tony n’a jamais été porté exclusivement que sur elle, la met hors d’état.
Automatiquement, elle culpabilise : lorsque Jal lui confesse le nombre hallucinant de maîtresses conquises par Tony, Michelle se met à pleurer. Elle regrette Tony. Elle s’imagine que tout est de sa faute. Qu’elle a fait fuir Tony.

Aussi improbable que cela puisse paraître, cet apitoiement est le signe d’un mal-être chez l’adolescent. Tandis que les envies changent, les attentes aussi, on s’imagine dès lors ne pas évoluer comme tout le monde et donc être inadaptable. Au lieu de revendiquer, on cherche à se fondre à la masse, à convenir aux gens et à leurs exigences. Si bien qu’on en arrive à des situations paradoxales : voilà Michelle, la victime, qui culpabilise ! Cette tendance est malheureusement à l’origine de bien des tourments : « je ne fais pas les choses comme il le faut », « je n’aurais pas du dire ça », « c’est mon caractère », ou encore « je ne suis peut-être pas assez jolie/fine/formée ». C’est ce genre de court circuit de pensée qui peut conduire de jeunes filles à se sous-estimer et à rentrer dans des jeux dangereux.

Car Michelle est dans l’incapacité de se porter un regard sur elle-même. Alors que l’adolescence pousse aux changements et aux prises de position, les difficultés pour se juger apparaissent. Sur quoi se baser ? Comment arriver à quelque chose de valable ? De quel droit pouvons-nous nous ériger comme valable ? Etant donné que les échelles de valeurs n’existent pas en soi, pour l’adolescent en train de grandir et de rentrer donc parmi les adultes, c’est-à-dire un monde où l’on est jugé en permanence, il est d’autant plus ardu de s’estimer par rapport aux autres, qu’on n’a aucun repères. Alors on se rabat sur les images à porter de mains : magasines, top-model, stars de télé…

Michelle, pour exister et se sentir bien, doit (s’en est presque vital) trouver un miroir. C’est en ce sens qu’elle croit tout ce qu’on lui dit. Comme sa fixette sur la taille de ses seins. A cause d’une mauvaise blague de Tony. Le combat de Michelle sera donc de dépasser cette contrainte. Malheureusement, ce n’est pas auprès de sa mère qu’elle trouvera du réconfort : cette dernière, grande gueule, femme d’affaire et énergique, s’entiche de jeunes playboys, qui en profite pour l’escroquer. Quant à Angie, la prof de psycho, qui surprend Michelle en train de se bourrer la gueule et de se prendre une murge (car il n’y a pas d’autres mots lorsqu’on vomit sur la robe de sa prof), elle est encore plus incapable : régressive, adolescente caricaturale, elle fond littéralement devant les avances du jeune Chris, présenté comme un jouvenceaux concupiscent, à peine croyable !

Alors Michelle va se tourner vers le seul regard qui l’estime, puisqu’elle est incapable de s’estimer toute seule, d’éprouver la moindre fierté pour ce qu’elle est, le regard de Sid. Au cours d’une scène à la fois bizarre et à la fois très émouvante (probablement une des meilleures de la saison), la voici qu’elle fait des propositions indécentes à Sid. Car, lui, est amoureux d’elle, vraiment, comme elle en a toujours rêvé, car il ne faut pas de leurrer, malgré ses strings et ses bouclettes, Michelle est une romantique. Sauf que voilà, il ne suffit pas de débarquer comme ça, à l’improviste, pour que tout à coup tout s’illumine. Le pauvre Sid, déjà gauche et maladroit, ne sait pas comment s’y prendre avec cette fille, qu’il trouve super canon et qui se met en soutif devant lui, avant de se mettre à tenter une fellation, qui échoue pitoyablement.
Car Sid est véritablement amoureux d’elle, il le reconnaît d’ailleurs (« cela fait huit ans que je rêve de toi toutes les nuits »), seulement ce n’est pas de ça dont il a rêvé. Ce scénario est sans doute horrible à vivre : il a la femme qu'il veut dans ses bras, mais en même temps, il ne l'a pas et ne l'aura jamais. Frustrant. Et Michelle se met alors à pleurer dans ses bras. On ne provoque pas le regard des autres. On ne le fabrique pas, autrement, c’est se mentir à soi-même.

Cette scène est d’autant bouleversante qu’elle met en exergue une injustice flagrante : Sid a toujours aimé et estimé Michelle, comme jamais Tony ne l’aura fait, pourtant Michelle n’arrive pas à se mettre sur la même longueur d’onde que lui. Sid le mériterait pourtant. On ne peut s'empêcher de ressentir une profonde compassion pour lui. Mais la vie est ainsi. On ne grandit pas de la même manière. Et l’amour ou tout du moins la reconnaissance des autres ne se commandent pas.
Si bien que Michelle ne se retrouve plus que toute seule.

Heureusement surviendra un garçon. Qui lui sera attiré par Michelle et qui pour une fois, a l’air normal. Il s’agit du frère d’Abigaïl, l’espèce de pouffiasse bourge qui est sortie avec Tony.
C’est lors d’une visite à l’hôpital de Cassie qu’elle le rencontre. Elle y a accompagné Sid, désireux de voir Cassie après sa tentative de suicide. Dans ce parc, qu’elle trouve sympa, il n’y aura que des couleurs, des ballons, des gâteaux et des fusées. Une sorte de refuge contre les angoisses de la vie adulte. Pas étonnant donc qu’elle se laisse séduire par le charme du garçon. Celui-ci représentera encore l’innocence, l’absence de problème et surtout le refus de devoir prendre des décisions, de s’avancer. Avec lui, tout sera bien, elle se sentira regardée et admirée. Son égo sera regonflée. Et cela amène alors d’autres sentiments : gargarisée par ce nouveau regard, vital pour elle, elle s’accrochera, idéalisera la relation, s’attachera.

C’était sans compter Tony.
Car Tony a un plan : il aime s’amuser. Comme il le dit à Sid, il s’ennuie et désire provoquer un peu d’action. Lorsqu’il récupérera Michelle, les choses auront été décuplées entre eux. En retour, Sid osera enfin ce qu’il n’a jamais faire : foutre un pain à Tony. Mais cela ne suffit pas, Tony pense avoir raison, il lance à Sid « tu as enfin compris ! tu as enfin compris ! ».
La machination de Tony est d’autant plus diabolique qu’on ne la voit pas venir. Il propose tout d’abord à Abigaïl de faire des photos cochonnes en l’embobinant comme il en a le secret. Puis il file son frère et se débrouille pour voler son portable. De là, il transfère les photos et les envoie alors à Michelle, ainsi qu’à tout le monde. On croit alors à un plan incestueux des plus fallacieux. Et Michelle se retrouve à nouveau seule.

Au lieu d’abandonner, Michelle va décider de grandir un peu : lorsqu’elle surprend le jeune mari de sa mère, en train de se morfondre parce qu’il a été fouttu à la porte, elle le convainc de revenir, malgré le fait qu’elle sait que c’est un minable qui exploite les complexes de sa mère. Et lorsque Tony revient, qu’il lui avoue être amoureux, qu’il s’excuse, qu’il lui promet qu’il changera, Michelle ne change pas d’avis et se détache de lui. Premier signe d’indépendance. A mettre en parallèle avec la réaction de Sid. Reste Tony, alors, seul, qui semble toujours ne pas grandir.

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